L’Opéra de quat’sous ; voilà un oxymore qui laisse supposer quelque décalage avec le genre noble de l’opéra et c’est bien ce qu’il faut y voir en effet puisque d’opéra il n’en a que le nom pour mieux en parodier le contenu traditionnellement attendu. Attaché particulièrement au théâtre musical, Jean lacornerie reprend la version originale de 1928, celle, née de l’étroite collaboration entre Bertolt Brecht et le compositeur Kurt Weill.
Pour l’histoire, dans le cloaque londonien, où « la bouffe passe la morale », nécessité et argent font loi. Flics corrompus, prostituées, voleurs et mendiants forment une société à l’image d’une humanité impitoyable. Nouvelle espèce d’esclavagiste, Monsieur Peachum règne d’une main de fer sur les mendiants de la ville, cependant que sa fille Polly vient d’épouser le brigand Macheath, chef d’une bande de malfrats. Il s’agit pour Peachum de récupérer au plus vite sa fille unique, et pour cela, faire arrêter Macheath, ce qui n’est pas compliqué; les putains du truand se chargeront de le trahir pour quelques billets. Après quelques péripéties sans surprise, distanciation brechtienne à l’oeuvre, la pendaison est prévue mais retournement brechtien oblige, la grâce et l’anoblissement de la canaille sont annoncés dans un dénouement qui rompt totalement avec les codes de l’opéra.